Des Chevaux et des Fesses
Tout à l'heure, voilà que je croise quelqu'un dans le miroir de la salle de bains. Vu que je vis rigoureusement seul je ne puis en douter, c'est moi.
J'évite les platitudes d'usage : "Tiens, toi zici ?... Çà fait longtemps, didonc !..."
"Eh oh, dis tout de suite que je me lave tous les 18 février pour mon anniv !... "
Je calme le jeu, je ne vais quand même pas me friter avec moi-même ; j'en viens à l'important :
- Chais pas si tu te rends bien compte, mais ça fait un bout de temps que tu n'as rien posté sur le blog.
- Je sais. Mais j'ai plein de trucs à faire, ça me prend la tronche. La "Musardine", tout ça...
- Ah !... "Maribel" ?... Me dis pas que tu vas reprendre ce bouquin devenu mythique ?...
- Si !... J'ai même bien avancé. Mais y a d'autres choses en projet, maintenant. J'ai revu Claude Bard, il y a peu, à Paname. Il est intéressé par un recueil de dessins. Des crobards, entre autres.
- C'est qui çui-là, Cro Bard ?...
- Non !... Claude Bard, c'est juste le boss de la Musardine, l' éditeur, quoi !... Me fais pas avoir des probs, pour une fois que je rencontre un éditeur sympathique !...
- Abaouais, chuis con bête !... En attendant, ton blog est bien creux. T'as pas une idée ?... Un truc vite fait ?...
- J'en ai des tas. Mais c'est jamais vite fait.
- Bon alors !... Quoi, par exemple ?...
- Je voulais parler de Le Rallic, depuis un bout de temps. Etienne Le Rallic.
- Un Breton ?... Il a fait quoi ?...
- Ça sent pas vraiment le Sud-Ouest, mais c'est pas ce qui compte !... C'est un illustrateur. Il a fait surtout plein de BD. Il était né en 1891, il est mort en 1968.
- Ça nous rajeunit pas...
- Dis, t'as encore beaucoup de lieux communs à lâcher comme des...
- Montre un peu ce qu'il faisait.
C'était un spécialiste des bestioles... Pas comme Calvo, bien sûr, mais il a fait pas mal dans le genre.
- C'est qui, Calvo ?... C'est sexy ?...
- Non. Ramène pas tout au cul, si tu veux bien.
- L'autre, eh !... C'est toi qui dit ça ?...
- Je parlerai de Calvo un autre jour. Ou pas.
Mais son grand truc, à Le Rallic, c'était les chevaux. Une vraie passion.
Le style de ses estampes, à cette époque, m'évoque très fort le remarquable dessinateur anglais Harry Eliott. Je crois en avoir déjà parlé sur le blog, mais je ne sais plus où.
Même la signature de Le Rallic semble emprunter au style d' Eliott...
Un auto-portrait d'Etienne, en tenue d'équitation, comme de bien entendu... Car il pratiquait, je suppose que tu avais compris. La cravache, les éperons... Le cheval, quoi !...
- Les vilaines filles...
- Arrête !... T'es pénible à la longue !...
Mais revenons à ses débuts : il travaille pour "Le Rire" et "Le Sourire", deux incontournables du dessin fripon humoristique. Il dessinera également pour "La Vie Parisienne", monument du genre, à l'instar des grands comme Giffey, Hérouard, Millière, Fontana...
- C'est du joli dessin, mais je trouve qu'il dessine mieux les chevaux que les filles...
- Tais-toi !... Mais Etienne Le Rallic s' est surtout affirmé dans le domaine de la Bande Dessinée, dans les années 1950. Les grands débuts de la BD, en somme. La BD pour la jeunesse, naturellement, soumises à des règles strictes de décence et de morale.
- Ca m'agace quand tu emploies des mots que je ne comprends pas...
Ça, c'est de la BD à l'ancienne !... "Capitaine Flamberge", seize images sur la planche, et c'est pas pour meubler !... L'action, les arrières-plans... De nos jours, on dirait "trop chargé, pas assez lisible"...
Sitôt qu'il en a l'occase, notre Breton fou dessine des canassons... Ici, une bande intitulée "Les Trappeurs". (Parue dans "L'Intrépide", mais je ne suis pas sûr).
- Pasque tu vérifies même plus tes sources, maintenant ?... Tu te prends pour un journaliste ?...Wikipédia copié-collé ?... C'est écrit dessus, que c'est paru dans "l'Intrépide" !...
- Ta gueule.
Et que nous y voilà !... Le Rallic dessine plein de couvs pour le Journal de Tintin !... (Avec à chaque fois des chevaux...)
-Tu peux me dire ce que ce dessin de l'honorable Cheneval vient faire ici ?... Hmmm ?...
- Ma fangue a lourché. Enfin non, j'ai vu un fouet, j'ai pas fait gaffe. Çà n'a rien à voir.
- Obsédé !...
Je voulais juste faire une allusion à mon ami Paul Cuvelier qui, à la même époque, dessinait aussi des couvs pour Tintin... Avec des bourrins !...Et si Le Rallic avait dessiné des choses légères, l'ami Cuvelier en avait fait bien d'autres, mais dans un domaine plus privé. Sa dernière compagne...
Que j'ai eu le privilège de rencontrer...
En 1938, Le Rallic illustre un bouquin sur la flagellation, comme il y en eut tant dans ces décennies, les plus célèbres de ces éditions étant "Les Orties Blanches", et "La Librairie Artistique et Parisienne", sous la houlette de Jean Fort.
Pour illustrer ce titre aux éditions "Prima", Le Rallic prend le pseudo de "R. FANNY". Pourquoi Fanny ?... Parce que c'est celle dont on embrasse le cul quand on perd à la pétanque ?... Nous ne le saurons sans doute jamais. Ni qui a signé l'ouvrage "Armand Du LOUP"...
Je ne peux m'empêcher de faire un parallèle avec René Giffey :
http://waldoblog05.canalblog.com/archives/2010/10/20/19383358.html
Ce dernier était un balaise de la bande dessinée "honnête", comme Étienne ; il publia comme lui au "Rire", "Sourire" et "Vie Parisienne"...
-Tu l'as déjà dit...
-Tu commences à me gonfler sérieux.
Mais Giffey, je lui connais trois bouquins SM illustrés, et Le Rallic, un seul. A noter aussi que Giffey ne s'est pas planqué derrière un pseudo...
- Alors ?... On en vient au fait ?...
- Mmmmhh...
- Fessée aux orties, visiblement... Sans protection de la main, je ris !... Ou alors, on se demande qui est la plus maso !...
- Sans doute l'illustrateur n'est-il pas acteur dans la vie...
-Très juste. Parfois, t'es assez réfléchi...
- Là, ce qui m'interpelle, ce sont les culs.
- Tu m'étonnes !...
- Non, je veux dire, comment Le Rallic, dessinateur réaliste ô combien, peut-il dessiner des culs absurdes, hypertrophiés, finalement moches ?... Parce que c'est tout sauf joli à regarder, des culs pareils !...
Ben voilà, je n'ai pas lu le bouquin, mais je ne sens pas l'illustrateur très impliqué. Dieu sait ce qui l'a amené à faire ce boulot... On peut aimer les chevaux et pas la cravache...
- Tu veux dire quoi, là ?...
- MEEERDE !...