Vingt-cinq Décembre
Comme tous les ans à la même date, c'est Noël. Quel conformisme !...
Je ne vais pas revenir sur mon rejet des fêtes obligées, et de celle-ci en particulier, mais cette fois, contrairement aux précédentes, je ne cèderai pas un pouce de tes reins. Pas de sapin enguirlandé semeur d'aiguilles et de courts-circuits, pas de gros barbu, pas de neige, pas de ritournelle étoilée à la guimauve, pas de petits souliers ni de Tino Rossi. Nada. Je vais juste vous raconter des trucs comme ça me vient, et vous en montrer aussi. Ca sera mes cadeaux. On verra bien si ça vous plaît... Dans le cas contraire, je vous préviens : ce n'est ni échangeable ni remboursable.
Ma seule concession à Noël (et à perpétuité), Ce sera cette jolie photo :
Non, je n'ai pas l'image sans le panneau, mais j'en ai d'autres...
Betty Page, la pin-up personnifiée, la fille de papier en os mais surtout en chair, qui semble avoir été conçue sur le capot d'un Mack, à moins que l'on ait carrément construit le camion autour de ses formes bandatoires !...
Les Américains étant ce qu'ils sont, et qu'ils étaient dans les années 50, les pin-ups décoratives des bahuts étaient naturellement beaucoup plus habillées. Si vous êtes sages, je vous montrerai Betty avec une culotte...
Le fouet n'est jamais bien loin dans les photos de Betty, parfaitement switch.
Les photos féticho d'Irving Klaw, le pygmalion -et plus encore- de Betty, mériteraient un sujet. J'y réfléchis.
Restons-en sur ce montage sans prétentions, de Miss Page divinement fessée !...
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L'éducation d'antan, et particulièrement l'enseignement, à l'école, au lycée, au collège, a généré un nombre incroyable d'illustrations. Et aux quatre coins de la Terre qui, ainsi que nous le savons, (*) est non seulement plate, mais carrée.
Les procédés pour punir un méfait, l'indiscipline, ou aider le cancre à se souvenir des affluents du Rhône sont quasi-toujours les mêmes, avec quelques variantes. Ici, la badine, et une belle brochette de jeunes Teutons se faisant tancer. Au premier plan, un banc recouvert de cuir dont la fonction semble évidente. A droite du cadre, un tabouret supporte des badines de rechange et ce qui semble être une ceinture. Gageons que ces drôles vont s'en prendre une soignée !... Le môme de droite se caresse préventivement les fesses...
Un dessin techniquement excellent. Toutefois, la perspective et les lois de la gravitations voudraient que la chaise de gauche arrête de faire de la lévitation.
Aux verges et en public. Aïe ! Aïe ! Aïe !...
Plus rustique... Une classe du vieil Ouest, vraisemblablement, sous le pinceau habile de Norman Rockwell. L'arme punitive du teacher est une branchette de je ne sais quoi, mais qui doit bien se sentir.
Mais l'enfance enfuie, dans certains établissements de rattrapage...
Sûr que quand la prof manie un paddle grand comme une planche à repasser, on fait moins son intéressant !...
La sévérité des collèges anglais n'est vraiment pas usurpée. Ici, la prof, miss Spankwell, punit durement mister Courtebeat à la cane, pour s'être érigé sans avoir levé le doigt avant.
Rassurons-nous, on fessait aussi dans les écoles françaises, hein ?... Mais j'ai pas d'images sous la main. Alors, un petit Malteste ne déparera pas...
Le temps qu'il doit falloir pour mettre cul nu une vilaine fille ainsi harnachée !...
Une belle étude de Louis Malteste. Crayon rehaussé de gouache sur papier teinté. L'oeuvre a un nom. Vous n'allez pas me croire... ça s'appelle : "Femme nue de Dos". SI !... La cellulite est parfaitement rendue, qui ne gênait pas à l'époque. Les magazines féminins parlaient cuisine et broderie plutôt que de s'occuper de vos fesses !...
(*) Celui ou celle qui ajoute : "de Marseille", je l'envoie chez Miss Spankwell.
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Du coup, ces images de la "Belle Epoque" -qui était loin d'être belle tous les jours-, m'évoquent quelque chose... Je vous raconte.
Sur la Butte Montmartre, il y a une petite bicoque, plantée juste au coin de la rue des Saules et de la rue de l'Abreuvoir. Elle est là depuis fort longtemps et y est encore aujourd'hui. Vu son état de décrépitude dans les années 1910, je gage qu'elle fut construite avant le siècle. Le siècle d'avant, vous me comprenez.
En passant soit dit, ce décor ne respire pas la richesse... Alors qu'aujourd'hui, pour habiter à Montmartre, faut allonger ses talbins.
Avec sa médiocrité habituelle, Maurice Utrillo peignit la petite maison.
Il ne fut pas le seul. Le peintre espagnol Santiago rusiñol (qui peignit beaucoup Montmarte) la représenta également. Avec davantage de talent. Elle semble assez pimpante, alors, la maisonnette...
Drapé dans son manteau noir, botté, coiffé de son gallure à large bords, l'écharpe écarlate flottant au vent comme un drapeau, Aristide Bruant passait tous les jours devant la petite maison pour se rendre, à quelques dizaines de mètres de là, rue des Saules, dans son cabaret à la sulfureuse réputation : "Le Lapin Agile".
Belle prestance, quand même, l'Aristide !...
La célébrissime affiche créée par Toulouse-Lautrec.
Oui, l'antre du chansonnier fut aussi baptisé : "Le Cabaret des Assassins"...
A Montmerte
Pas toujours très compréhensible pour qui ne parle pas l'argot de cette époque, mais la vraie voix gouailleuse de Bruant qui nous parvient cent-cinq ans plus tard, c'est inestimable. (**)
Et Utrillo barbouilla la maison d'un peu plus loin, au carrefour avec la rue Cortot...
Parfois, une jolie jeune femme brune au lourd chignon sortait de la petite maison, et Aristide, fort galamment, soulevait son vaste feutre pour lui adresser un respectueux salut. La jeune dame baissait les yeux, rasait les murs et filait prestement par la rue de l'Abreuvoir, sans voir le sourire probable du chantre des apaches et des rôdeuses de barrière...
Les années passèrent. En 1913, la dame mit au monde une fille, et le jeune couple émigra vers Bagnolet, rompant avec trois générations de montmartrois... Puis ce fut la guerre, mais c'est une autre histoire.
De plus en plus décrépite, la petite maison, à laquelle on avait ajouté une fenêtre arrondie, fut un jour retapée et peinte en rose.
Encore plus bourré qu'à l'ordinaire, Utrillo en profita pour peindre à nouveau le site, quasi-méconnaissable après qu'il eut supprimé l'étage supérieur !... Il paraîtrait que c'est cette croûte qui l'a rendu célèbre. Comme quoi il en faut peu.
Eh bien, la Maison Rose est plus que jamais rose, et elle abrite, depuis plusieurs décennies, un restaurant fort apprécié des touristes.
Oui oui oui, dites-vous... Et alors ?... Où est l'astuce ?... Où est la chute ?... Ok, en fait, ça n'a guère d'intérêt que pour moi, mais il se trouve que la jeune dame que j'ai évoquée plus haut était ma grand-mère... Et ma mère est née dans cette baraque, en juin 1913.
(**) Si vous voulez des cours d'argot, passez donc me voir !...
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Vous fûtes nombreuses à m'implorer à genoux, les mains jointes et tremblantes, les traits douloureux, au bord des larmes, tandis que je faisais briller négligeamment mes ongles en les frottant sur mon revers, pour que je daigne publier quelques unes de mes oeuvres impies dans ce post. Soit. C'est Noël.
Des crobards, je sais que vous aimez bien, quelques déjà vus, et des inédits de chez inédit...
Mais j'ai déjà beaucoup écrit, place aux images !...
Couic !...
Vous connaissez la version terminée de celui-ci...
De circonstances...
Je cherchais la version achevée de ce croquis ; je n'ai pas trouvé l'original mais la version imprimée en double page :
C'est encore plus amusant... Vous pouvez juger des textes édifiants que les rédacteurs collaient autour de mes dessins !...
Aaaah, la joie du faux courrier des lecteurs !...
Un des pisse-copie m'avait même consacré un article élogieux de six pages...
Bon, ben c'est pas que je m'ennuie, mais ça commence à être lourd, ce post !... J'espère que vous le digérerez bien, surtout après votre gueuleton de Noël... Aspirine/Alka-Seltzer, recette éprouvée !... Allez, une dernière blagounette, et je vous fais la bise !...